Les Toulousains sont confrontés chaque samedi depuis plus de 100 jours à une vague sans précédent de violence. Nous ne pourrons sortir grandis de cette épreuve que par le dialogue. J’ai régulièrement appelé chacune et chacun, en particulier les manifestants, à participer au Grand Débat National voulu par le président de la République pour que l’échange remplace l’affrontement et le désordre. Je suis avant tout le père de deux jeunes femmes et je suis très soucieux de leur avenir dans un pays aujourd’hui en proie à la violence et à un antagonisme exacerbé des uns par rapport aux autres.
Il y a un temps pour la parole publique – je me suis souvent exprimé en tant que Maire sur cette crise – et un temps pour accomplir son devoir civique. C’est aujourd’hui comme simple citoyen que je prends la plume.
Choisir une écologie ambitieuse, locale et réaliste
Je souhaite commencer par le défi de notre génération, celui de la transition écologique. La capacité à agir de nos territoires est d’autant plus criante que, depuis des années, l’État a démontré son incapacité à agir efficacement en la matière. L’écologie punitive, qui passe par des taxations exorbitantes et dont le produit fiscal se noie dans la masse des déficits budgétaires nationaux, n’est plus acceptable : les gilets jaunes ont eu raison de l’exprimer.
Je considère que les collectivités locales sont le bon échelon pour une transition écologique concrète et concertée. Je propose la création d’un dispositif inspiré du 1% artistique (obligation pour l’État et les collectivités publiques de consacrer 1% du budget d’une construction neuve à la commande d’œuvres artistiques). Il pourrait s’appeler le « 1% écologie » : 1% du coût de chaque projet d’investissement public serait dédié au financement de toute action allant dans le sens du développement durable (présence de la nature en ville, sobriété énergétique, promotion des circuits courts, etc..).
Il me semble indispensable, par ailleurs, que la solidarité fiscale prenne tout son sens pour répondre à cette urgence. Les hauts patrimoines financiers ne sont désormais plus assujettis à l’ISF. Ces capitaux – dès lors qu’ils ne sont pas investis dans des PME françaises pour développer l’emploi – pourraient être taxés, et le produit de cette fiscalité serait utilisé pour aider les ménages modestes à mieux isoler leur logement, acquérir des panneaux photovoltaïques, etc. D’une pierre deux coups : on incite à investir au bénéfice de l’emploi et, pour ceux qui ne le souhaitent pas, leur impôt est fléché directement vers les plus modestes pour lutter contre la précarité énergétique. Ce serait bien plus pertinent que de rétablir l’ISF, totem idéologique franco-français, qui chasse les plus riches vers les pays concurrents sans pour autant soulager les plus pauvres.
Restaurer la confiance dans nos institutions
La fiscalité est au cœur de la crise que nous traversons. La gestion de l’argent public devrait pourtant faire l’objet d’un pacte de confiance entre citoyens et collectivités nationale et locales. La suppression de la taxe d’habitation est, en soi, une mesure positive pour les habitants mais elle n’a de sens que si elle s’inscrit dans une remise à plat complète de la fiscalité locale, aujourd’hui éclatée, illisible et injuste. Parmi les nombreuses mesures à prendre, je propose que la part de la taxe foncière et la part de la CVAE (Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises) que touchent aujourd’hui les Conseils départementaux, soient désormais perçues par les communes et intercommunalités (qui en touchent d’ores et déjà une partie…). En compensation intégrale, une part de la CSG nationale, impôt dynamique, serait reversée aux Départements dont l’action sociale est au cœur des compétences.
Je propose, par ailleurs, que la dépense publique fasse l’objet de plus de pédagogie. Le coût réel des services publics – totalement ignoré de nos concitoyens – devrait être affiché de façon très visible, à travers des affiches apposées dans les lieux accueillant du public, comme nous nous efforçons de le faire à Toulouse à destination de nos habitants. Cela vaut notamment pour la Sécurité sociale : qui connait le coût réel des soins médicaux dont il bénéficie ? Pourtant, elle est largement financée par l’impôt désormais.
Enfin, en matière d’organisation de l’État, je souhaite une nouvelle étape de décentralisation. Trop de technostructures parisiennes regardent avec dédain les élus locaux. Certains, qui n’ont jamais mis les pieds dans une mairie, sont persuadés de savoir mieux que les maires comment bien administrer une collectivité ! Le seul rempart contre ce centralisme persistant, c’est de renforcer la décentralisation. Cela passe aussi par un allègement des normes, sans cesse alourdies par l’État pour tous, en particulier pour les collectivités.
D’ailleurs, l’organisation de l’État lui-même gagnerait à être rééquilibrée par davantage de déconcentration : allégeons le poids des administrations centrales éloignées des réalités territoriales et renforçons les services de l’État en région autour des préfets.
Réaffirmer le devoir d’exemplarité des élus
Je pense nécessaire de maintenir le non cumul des mandats, comme je me l’étais appliqué à moi-même plus de 3 ans avant que la loi n’empêche d’être à la fois député et maire. J’avais été le seul maire nouvellement élu en 2014 à démissionner immédiatement de mon mandat de député.
Si, ainsi que certains le suggèrent, on rétablissait le cumul entre un mandat parlementaire et le mandat de maire pour des communes de taille limitée, le déséquilibre actuel de la représentation politique française, au détriment du monde urbain, se trouverait aggravé. Ce serait un recul de la démocratie !
Dans le même ordre d’idée, je souhaite que soit instaurée une retenue sur indemnités pour les élus locaux absents des conseils municipaux et intercommunaux. J’avais voulu mettre en place un tel système en début de mandat en 2014 – système qui existe pour d’autres collectivités que les communes et les intercommunalités – mais il s’est avéré que la loi ne le permettait pas. Il conviendrait que cette réglementation évolue car, lorsqu’un salarié est absent de son travail sans justification, une sanction (retenue sur salaire…) lui est imposée. Il est incompréhensible que tous les élus ne soient pas soumis au même régime ! Il conviendrait également de renforcer les sanctions contre l’absentéisme des parlementaires, même si du chemin a été parcouru en la matière.
Renforcer la vitalité démocratique
Sur le plan de la participation citoyenne, je réaffirme le caractère fondamental de la co-construction dans les projets publics locaux : alors que nous consacrons à Toulouse une part du budget municipal à des projets choisis et/ou co-construits avec la population, il conviendrait de généraliser les budgets participatifs en les inscrivant dans la Loi. Un dispositif pourrait être imaginé afin d’inciter à y recourir, comme par exemple une majoration des dotations d’État aux collectivités qui consacrent un certain pourcentage – à déterminer – de leurs ressources à des budgets participatifs.
D’autre part, je propose qu’en matière de délégation de service public, et au-delà d’un certain montant, le contrôle citoyen devienne une obligation légale. Citoyens et associations d’usagers seraient ainsi systématiquement inclus dans les instances de gouvernance, comme nous l’avons fait à Toulouse – par la négociation – à l’occasion du choix du mode de gestion de l’eau du robinet à partir de 2020.
Enfin, je suis favorable à la reconnaissance du vote blanc ainsi qu’au caractère obligatoire du vote, comme cela existe en Belgique. Car la République, ce sont des droits mais également des devoirs, ce qu’il semble essentiel de rappeler face à une certaine tendance sociétale au consumérisme.
Inventer de nouvelles solidarités territoriales
Je souhaite terminer cette contribution par la solidarité territoriale.
Au côté des jumelages à l’international, j’aimerais que soit développé un dispositif de partenariat local, à l’instar de ceux conclus entre Toulouse Métropole et le Pays des Portes de Gascogne, ou encore avec Tarbes-Lourdes-Pyrénées. Il s’agirait de rendre obligatoires les contrats de coopération rural/urbain pour les grandes métropoles vis-à-vis des territoires environnants (villes moyennes ou communautés de communes rurales), pour favoriser l’économie locale, les échanges, les circuits courts.
Enfin, le Sénat, contrepouvoir important, doit voir renforcée sa légitimité territoriale. Depuis toujours, il est considéré comme le représentant des collectivités territoriales. Mais, aujourd’hui, il assure cette représentation de façon imparfaite car, du fait du mode de scrutin désignant les sénateurs, il représente surtout un seul type d’élus, les maires.
Je propose donc un double mode de désignation des Sénateurs :
JLM
économie, environnement, métropole, politique nationale, toulouse
assemblée nationale, politique nationale
environnement
culture
environnement
politique de la ville
enseignement, petits toulousains
institutions
déplacements, économie